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HTA

Publié le 06 déc 2011Lecture 8 min

e-Direct cardio : une heure de direct consacrée à l’HTA - Une rencontre animée et riche d’enseignement

M. DEKER

Organisée par Cardiologie Pratique-Axis TV, avec le soutien institutionnel d’Ipsen, le premier rendez-vous e-Direct cardio consacré à l’hypertension a réuni plus de 300 webspectateurs pour une heure de direct.
C’est dans cette ambiance chaleureuse et conviviale que Cardiologie Pratique avait réuni, autour de Jean Chapsal, Claire Mounier-Véhier (Lille), Bernard Vaïsse (Marseille), Jacques Blacher (Paris) et David Rosenbaum (Paris).
À l’issue de cette rencontre particulièrement animée et riche d’enseignement, un seul regret, ne pas avoir eu le temps de répondre à de trop nombreuses questions.

Tout commence par la mesure de la PA La mesure de la PA traditionnelle doit céder le pas aux mesures automatiques avec un appareil oscillométrique validé (la liste des appareils validés figure sur le site de l’Afssaps et de la Société française d’HTA), comme le préconisent de plus en plus les recommandations, selon B. Vaïsse. Elle doit être répétée au moins 2 fois pour minimiser la variabilité, et pour le NICE britannique, une 3e fois si la PA reste élevée, en prenant la moyenne des 2 dernières mesures. Les mesures effectuées en dehors du cabinet médical sont aujourd’hui recommandées par la Société française d’HTA, en particulier l’auto-mesure, à condition que le patient l’accepte et ne soit pas trop anxieux, en privilégiant la mesure humérale et en respectant la règle des 3 : 3 mesures le matin, 3 jours consécutifs. L’automesure n’est pas toujours suffisante. La MAPA a l’avantage de refléter la PA des 24 h, en activité et pendant la nuit (dont la valeur prédictive est reconnue). Elle est aussi recommandée chez un patient dont la PA est très variable en automesure, en cas de malaise lipothymique, s’il ne consent pas à faire l’automesure et s’il est très anxieux car un patient anxieux fera trop d’automesures. Les chiffres à retenir sont : 135/85 mmHg en automesure comme en MAPA le jour, de 120/70 mmHg la nuit en MAPA, de 130/80 mmHg sur les 24 h pour la MAPA. Un effet blouse blanche est possible en automesure. Ne pas tenir compte de la 1re mesure, souvent plus élevée, elle ne change pratiquement rien. La fréquence cardiaque (FC) en complément de la PA n’a de valeur que diagnostique. Une FC très élevée le jour, très basse la nuit, conjointement à une PA élevée le jour et basse la nuit, peut orienter vers une hypertonie du système sympathique. Chez un patient en fibrillation atriale, les mesures automatiques sont faussées, aussi bien en automesure qu’en MAPA. Dans ce cas, le tensiomètre classique reprend de la valeur à condition de multiplier les mesures. Un cas particulier, souligné par J. Blacher, est celui des patients diabétiques ou âgés chez lesquels la mesure de la PA doit être réalisée debout pour rechercher une hypotension orthostatique, de mauvais pronostic. Mais chez les diabétiques, il faut aussi chercher par automesure ou MAPA une hypertension masquée, présente chez 15 à 30 % d’entre eux.   De gauche à droite : B. Vaïsse, C. Mounier-Véhier, J. Chapsal, J. Blacher et D. Rosenbaum. Une MAPA chez tout le monde, même les normotendus ? Non, il faut la réserver aux sujets à haut risque cardiovasculaire ou aux sujets ayant une PA quasi normale, mais un retentissement viscéral. Nous n’avons pas la certitude absolue qu’il faille traiter les HTA masquées, mais leur pronostic est mauvais. En cas de divergence entre les mesures cliniques et l’automesure, tout le monde s’accorde pour privilégier la MAPA. L’HTA diastolique existe, mais c’est le privilège des sujets jeunes, exceptionnellement des plus âgés, et elle n’est pas facile à traiter. Une solution lorsque la circonférence du bras interdit la prise de la PA : la prendre au poignet, à l’avant-bras, mais cela n’est pas validé.   Rechercher une cause d’HTA secondaire : quel bilan ? Étant entendu que 95 % des HTA sont essentielles, la recherche d’une cause rare, grave, éventuellement curable, n’autorise pas à se lancer dans un bilan exhaustif inutile, selon D. Rosenbaum. Un interrogatoire habile peut renseigner sur quelques causes simples : la prise de la pilule, la consommation d’anis, la surconsommation de sel. Chacun fait un examen cardiologique complet chez l’hypertendu, mais qui palpe les reins ? Or, la polykystose rénale est la première cause d’HTA secondaire. Rechercher une coarctation de l’aorte passée inaperçue chez un patient né hors de France peut aussi être rentable, car c’est une cause d’HTA résistante tardive. Le simple ECG analyse le retentissement de l’HTA. Le bilan biologique comporte, outre une NFS, uricémie et sédiment urinaire, un ionogramme à la recherche d’une hypokaliémie et une créatininémie. La kaliémie varie normalement entre 3,5 et 4,5 mmol/l, mais chez un hypertendu, une valeur de 3,6-3,7 doit orienter vers une HTA secondaire ; chez un hypertendu traité par antagoniste du système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA), la norme est 3,9-4 mmol/l. Avec la forte prévalence actuelle des sujets en surpoids, l’HTA métabolique est devenue fréquente. Devant une hypokaliémie, il faut penser à une hypercortisolémie, pas seulement à un adénome de Cohn, mais surtout à un Cushing. En effet, de nombreuses formes précliniques de Cushing se manifestent par une hypertension, une dyslipidémie ; un dosage du cortisol libre urinaire des 24 h permet d’en faire le diagnostic simplement. Une clairance de la créatinine < 60 ml/min relève d’une prise en charge conjointe par le néphrologue après s’être assuré de l’absence de cause, du type prise d’AINS ou événements intercurrents. Dans la recherche d’une cause, l’attitude diffère selon les centres de référence : à la Pitié, pour D. Rosenbaum, le scanner précède les dosages hormonaux qui nécessitent de démaquiller le traitement (6 semaines pour les antialdostérones, 15 j pour les thiazidiques, les IEC et les ARA II, 6 j pour les bêtabloquants) et d’avoir corrigé la kaliémie et la natrémie. Pour d’autres, la recherche d’un hyperaldostéronisme passe d’abord par les dosages hormonaux, mais tout peut être réalisé dans le même temps. Quant au test à la spironolactone, il pourrait se justifier chez un sujet âgé à fonction rénale normale, mais pas chez un sujet de 40-50 ans qui pourrait bénéficier de l’ablation d’un éventuel adénome.   Traiter l’HTA essentielle Si la monothérapie est la règle pour débuter le traitement, il est presque toujours nécessaire de recourir à une bithérapie pour parvenir aux objectifs. Les bithérapies à doses fixées, dont il existe plusieurs combinaisons fixes en plusieurs dosages, offrent l’avantage de diminuer le nombre de comprimés à prendre et permettent d’améliorer l’observance, selon J. Blacher. Elles permettent aussi de surmonter l’inertie thérapeutique et de diminuer le coût du traitement. Les groupes d’experts considèrent aujourd’hui qu’une association doit comporter un bloqueur du SRAA et soit un calcium-bloqueur soit un diurétique. Les tenants des IEC s’appuient sur leur moindre coût, leur niveau de preuves et leur sécurité d’emploi. Les partisans des ARA II considèrent qu’ils ne sont pas inférieurs aux IEC et qu’ils sont extrêmement bien tolérés. Le choix entre diurétique et calcium-bloqueur repose sur une seule étude qui a montré la supériorité de ce dernier, choix entériné par les recommandations britanniques du NICE. Ces dernières sont très pragmatiques : une MAPA chez tous les hypertendus, un IEC ou un ARA II « low cost » en 1re intention ; si la MAPA est négative, pas de traitement (c’est économique), ce qui ne dispense pas de suivre les patients qui risquent de développer une HTA. B. Vaïsse rappelle à cet égard que le risque d’accident vasculaire lié à l’HTA masquée est équivalent à celui d’une HTA permanente (le double d’un normotendu), d’où l’intérêt de la dépister et sans doute de la traiter, mais nous n’en avons pas la preuve. Chez le sujet âgé, nous savons depuis l’étude HYVET que les plus de 80 ans tirent bénéfice du traitement. Les objectifs ne devraient pas être aussi ambitieux que chez les plus jeunes : 2, voire 3 antihypertenseurs au plus, sans chercher à normaliser le profil tensionnel et en se basant sur une PA mesurée debout : si le patient a 17 en position couchée ou assise et 12 debout, il ne faut surtout pas augmenter le traitement. Et la bithérapie d’emblée ? En France, il n’y a pas d’AMM pour les bithérapies à pleine dose en 1re intention. Certaines recommandations les préconisent, quand la PA et/ou le niveau de risque sont très élevés. Ce point figure dans l’agenda de la HAS pour ses futures recommandations. Une monothérapie ne suffira jamais pour contrôler une PAS à 180 mmHg, surtout chez un diabétique ou un patient à risque élevé ! Cela suppose toutefois d’avoir effectivement pris la PA en mesure automatique pour éliminer un effet blouse blanche, surtout chez le sujet âgé (sa prévalence est de 40-50 %), mais aussi chez les enfants et les adolescents, et ce n’est plus si rare avec l’obésité. Quant à l’angioplastie, les essais n’ont pas démontré sa supériorité sur un traitement médical bien conduit. Ses indications ont été reprécisées en cas de situation non maîtrisée sur une sténose de l’artère rénale (HTA très sévère, sténose serrée sur rein unique, OAP flash, insuffisance rénale évolutive sous traitement, dysplasie de la femme jeune). La dénervation rénale n’est pas encore un acte validé et doit rester dans le cadre de protocoles de recherche clinique, malgré l’engouement qu’elle suscite.   HTA résistante Elle est définie par une PA de consultation > 140/90 mmHg malgré 3 antihypertenseurs dont un thiazidique ou apparenté à pleine dose, pris pendant 4 à 6 semaines, définition critiquable selon C. Mounier-Véhier si l’on se réfère à l’enquête FLASH qui montrait que 16 % des patients reçoivent la trithérapie adéquate (thiazidique + antagoniste du SRAA + calcium-bloqueur). Il faut s’assurer du diagnostic et, pour cela, la MAPA est préférable à l’automesure, vérifier que le traitement est conforme, que le patient prend son traitement, avant d’envisager un bilan exhaustif. Certaines situations cliniques (obésité, surconsommation de sel, dépression, prise d’antidépresseur) ou thérapeutiques (AINS, estrogènes, sympathomimétiques, immunosuppresseurs, drogues illicites) rendent compte de l’HTA ; il faut aussi penser à un syndrome d’apnées du sommeil. Devant une véritable HTA résistante, la prescription de spironolactone à petite dose peut suffire pour infléchir un processus de résistance avec peu de risque d’effets indésirables, avant d’engager un bilan.   Les plurithérapies lourdes, est-ce inéluctable ? Certains patients ont de très longues ordonnances qui méritent réévaluation. En pratique, on doit vérifier l’observance ; on peut essayer de diminuer, et aussi de mettre le système vasculaire au repos (nicardipine en seringue autopulsée) avant de recommencer l’escalade thérapeutique. Les bithérapies fixes sont utiles et la suppression d’un antihypertenseur de la liste peut très bien ne rien changer, la réponse à un antihypertenseur étant très variable selon les patients.

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