Publié le 06 oct 2009Lecture 6 min
Échocardiographie transœsophagienne lors du remplacement valvulaire aortique percutané (RVAP)
E. BROCHET, Département de Cardiologie, Hôpital Bichat, Paris
Le remplacement valvulaire aortique percutané (RVAP) est actuellement réalisé avec deux types de prothèses. La prothèse Edward Sapien, bioprothèse d’origine bovine, est montée sur un stent et mise en place par dilatation au ballon. Elle peut être implantée par voie artérielle rétrograde ou par voie transapicale. La prothèse CoreValve, en tissu péricardique d’origine porcine, est montée sur un stent autoexpansible. Elle est implantée par voie artérielle rétrograde.
Rôle de l’échocardiographie avant la procédure
L’échocardiographie joue un rôle majeur dans la sélection des candidats à ce type de traitement. L’échographiste impliqué dans la sélection des patients doit avoir une bonne connaissance des caractéristiques des prothèses, de leurs aspects échographiques et de leurs conditions d’implantation (tableau).
L’échographie transthoracique (ETT) reste la technique la plus utilisée avant la procédure, permettant :
– de confirmer le caractère serré de la sténose aortique,
– de vérifier les prérequis anatomiques nécessaires à l’implantation, notamment les dimensions de l’anneau aortique et de la racine aortique ;
– enfin, de rechercher des contre-indications (bicuspidie aortique, hypertrophie sous-aortique obstructive, dilatation excessive de l’aorte ascendante).
L’ETO est indiquée dans le processus de sélection en cas d’ETT de qualité insuffisante, lorsque le diamètre sous-aortique est difficile à mesurer (calcifications) ou lorsqu’il se situe près des valeurs limites. Dans notre pratique, nous effectuons une ETO dès que le diamètre de l’anneau dépasse 24 mm en ETT ou lorsqu’il existe un doute sur une bicuspidie aortique.
Rôle de l’échocardiographie pendant la procédure
L’échographie joue également un rôle très important pendant la procédure, ne serait-ce que pour le dépistage précoce des complications et l’évaluation immédiate du résultat.
L’ETO est la technique échographique la plus fréquemment utilisée, effectuée sous anesthésie générale, même si certains centres préfèrent ne pas réaliser d’anesthésie et recourent à une surveillance par ETT. Les apports de l’ETO au cours de la procédure de RVAP sont multiples :
Immédiatement avant la procédure
L’ETO permet de remesurer le diamètre de l’anneau aortique, qui est un élément capital dans le choix de la taille de la prothèse.
Cette mesure est difficile et, dans de nombreux centres, c’est la mesure finale de l’anneau effectuée en ETO en début de procédure qui est retenue pour le choix de la taille de la prothèse.
Le diamètre de l’anneau est mesuré en coupe longitudinale à 120°, en mode zoom, au niveau de l’insertion des sigmoïdes aortiques (figure 1). La coupe doit être parfaitement alignée avec la chambre de chasse ventriculaire gauche et le départ de l’aorte ascendante. L’utilisation du cineloop est très utile pour bien identifier la zone d’insertion des sigmoïdes.
Figure 1. Coupe longitudinale à 120-130° en ETO. Mesure du diamètre de l’anneau aortique en protosystole.
– Cette mesure est parfois difficile à effectuer en raison des calcifications, et nécessite d’être répétée et moyennée. Des travaux récents ont montré que la mesure en ETO pouvait être légèrement supérieure à celle effectuée en ETT (de l’ordre de 1 mm), et ceci peut être expliqué par une meilleure résolution des images en ETO. Dans notre expérience, les mesures ETT et ETO sont généralement concordantes lorsque l’ETT est de bonne qualité.
– D’autres éléments sont systématiquement analysés en ETO pendant cette phase initiale :
Valve aortique :
- morphologie de l’orifice aortique, vérification du caractère tricuspide de l’orifice,
- importance et répartition des calcifications, et éventuelle extension sur la racine aortique,
- présence et importance d’une insuffisance aortique.
Aorte initiale :
- mesure des diamètres au niveau des sinus de Valsalva, de la jonction sinotubulaire (ne devant pas dépasser 43 mm pour la prothèse CoreValve) et de l’aorte tubulaire,
- position des ostia coronaires (notamment ostium coronaire droit) par rapport au plan de l’anneau (distance de plus de 11 mm nécessaire pour la prothèse Edwards).
Ventricule gauche :
- hypertrophie sous-aortique, présence éventuelle d’un bourrelet sous-aortique pouvant dans certains cas gêner l’implantation de la prothèse,
- cinétique ventriculaire gauche régionale et globale.
Valve mitrale :
- présence et importance d’une insuffisance mitrale ;
• Analyse des cavités droites, de l’aorte thoracique descendante et de la crosse aortique, à la recherche d’athérome compliqué ou de thrombus ;
• Étude du péricarde à titre de référence avant la procédure :
Pendant la procédure de RVAP
La contribution de l’ETO est importante à chaque étape de la procédure.
– Franchissement de la valve aortique et positionnement du guide dans le ventricule gauche :
• Analyse du franchissement de l’orifice aortique par le guide, notamment lors des procédures par voie transapicale où une orientation anormale du guide peut être difficile à apprécier en scopie ;
• Analyse du positionnement correct du guide dans le ventricule gauche au cours des procédures par voie fémorale.
– Valvuloplastie aortique au ballon : l’ETO précise la position correcte du ballon lors de l’inflation et permet d’identifier une éventuelle aggravation de l’insuffisance aortique ;
– Positionnement de la prothèse : l’ETO, en complément de la fluoroscopie et de l’angiographie, aide au positionnement correct de la prothèse au niveau de l’orifice aortique avant son déploiement :
• pour la prothèse Edwards, le stent doit être différencié du ballon sur lequel il est monté et être positionné au centre de l’orifice (figure 2). La stabilité de la position peut être testée au cours d’une brève stimulation ventriculaire rapide ;
• pour la prothèse Core valve, l’extrémité de la prothèse est positionnée 5-10 mm sous l’orifice aortique avant son déploiement.
– Déploiement de la prothèse :
• Prothèse Edwards : le déploiement est très rapide, s’effectuant sous stimulation ventriculaire rapide afin de stabiliser la prothèse au site d’implantation. L’ETO permet de surveiller l’expansion de la prothèse sur le ballon et son positionnement ;
• Prothèse CoreValve : la prothèse est progressivement déployée de bas en haut, sous surveillance scopique et échographique. Le déploiement progressif de la partie aortique du stent permet un éventuel repositionnement de la prothèse.
– Évaluation du résultat immédiat :
• C’est sûrement l’apport le plus important de l’ETO dans cette procédure, appréciant immédiatement la position de la prothèse, la cinétique des cusps et la présence et la sévérité d’une éventuelle insuffisance aortique.
Figure 2. Coupe longitudinale à 120° en ETO. Positionnement de la prothèse Edwards au niveau de l’orifice aortique. Le stent doit être différentié du ballon sous jacent.
• Certains éléments sont propres à chaque type de prothèse :
- prothèse Edwards : chevauchement éventuel sur la valve mitrale antérieure, perméabilité des troncs coronaires au Doppler couleur. Un jet d’insuffisance aortique central lié à la présence du guide est fréquent et généralement rapidement résolutif. Des petits jets de fuite aortique paraprothétiques sont également fréquents et généralement minimes (figures 3 et 5) ;
- prothèse CoreValve : analyse de la partie inférieure sur la base de la valve mitrale antérieure, position des cusps de la prothèse en supra annulaire au niveau des sinus de Valsalva (figure 4). La partie haute de la prothèse épouse les contours de l’aorte ascendante. Des petits jets de fuite aortique paraprothétiques sont également fréquents.
Figure 3. ETO en mode biplan (sonde matricielle). Aspect échographique de la prothèse Edwards Sapien après déploiement.
Figure 4. ETO en mode biplan (sonde matricielle). Aspect échographique de la prothèse CoreValve après déploiement. Noter l’appui de la partie basse de la prothèse au niveau de la chambre de chasse ventriculaire gauche (*), et la position supra-annulaire des cusps au niveau de la zone intermédiaire de la prothèse.(x)
Figure 5. Coupe longitudinale à 120° en ETO. Prothèse Edwards Sapien. Minime jet de fuite aortique paraprothétique postérieur.
Rôle de l’ETO dans le diagnostic des complications
Un rôle majeur de l’ETO est l’identification rapide des complications et de leur mécanisme :
– pendant la procédure, l’ETO peut identifier une hypovolémie, l’apparition d’une insuffisance mitrale ou une tamponnade ;
– immédiatement après l’implantation, en cas d’hypotension brutale, l’échographiste doit rapidement rechercher la présence d’une insuffisance aortique importante, intra- ou paraprothétique, une tamponnade, une dysfonction ventriculaire régionale ou globale (occlusion coronaire), une dissection aortique ou une dysfonction mitrale.
Apport de l’ETO 3D temps réel
L’ETO 3D temps réel est une technique d’introduction récente, qui utilise un capteur matriciel permettant de coupler l’imagerie conventionnelle 2D et l’imagerie volumique 3D temps réel. Cette technique permet une meilleure évaluation des structures anatomiques et l’analyse des relations entre cathéters, prothèses, et structures cardiaque. Son apport semble intéressant au cours de procédures de RVAP, pour la mesure précise de l’anneau aortique, mais également au cours de la procédure pour guider le positionnement de la prothèse (figure 6).
Figure 6. ETO 3D temps réel. Visualisation du stent de la prothèse Edwards Sapien avant déploiement (flèches).
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