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HTA

Publié le 28 nov 2006Lecture 4 min

HTA après 80 ans : faut-il traiter ?

J.-M. HALIMI, hôpital Bretonneau (Tours) et O. Hanon, hôpital Broca (Paris)

L’augmentation de l’espérance de vie pose aujourd’hui la question du traitement de l’HTA chez les sujets très âgés. Nous ne disposons malheureusement que de peu de données issues des essais thérapeutiques mais les éléments de preuve disponibles incitent toutefois à intervenir.

La population vieillit En France, l’espérance de vie moyenne à la naissance est actuellement de 80,2 ans (76,7 ans pour les hommes et 83,8 ans pour les femmes). L’espérance de vie à 60 ans a progressé de près de 7 ans en 50 ans pour atteindre aujourd’hui 26,5 ans chez les femmes (soit 7,7 ans de plus qu’en 1954) et 21,5 ans chez les hommes (soit 6 ans de plus qu’en 1954). La proportion des personnes âgées au sein de la population ne cesse donc de croître et la progression des effectifs est d’autant plus marquée qu’il s’agit des groupes les plus âgés : la proportion des 80 ans et plus va passer de 4 à 10 % entre 1995 et 2050 et celle des 90 ans et plus de 0,6 à 2,1 %. L’élévation de la PA a longtemps été considérée chez l’octogénaire comme un « effet physiologique » du vieillissement, parfois même perçu comme souhaitable pour le maintien des débits viscéraux. Plusieurs études récentes ont démontré une réduction des AVC grâce au traitement antihypertenseur, même après 80 ans. Pourtant, toutes les données épidémiologiques soulignent un contrôle tensionnel insuffisant chez les hypertendus âgés. Ainsi, en France, un contrôle tensionnel satisfaisant (PA < 140/90 mmHg) n’est observé que chez 30 % des hypertendus > 65 ans (étude 3C). Les raisons de ce mauvais contrôle tensionnel s’expliquent par un diagnostic plus difficile à faire et surtout par la réticence des médecins à traiter l’HTA et à renforcer le traitement comme il se doit, en raison du risque d’accident iatrogène.   L’HTA reste un facteur de risque vasculaire Chez les sujets âgés, les maladies CV représentent la première cause de mortalité et entraînent une perte d’autonomie importante du fait de leur morbidité. Les données d’une métaanalyse, portant sur l’analyse d’un million de personnes, ont ainsi montré que, quel que soit l’âge, même après 80 ans, l’HTA reste un important facteur de risque de mortalité CV. Les résultats indiquent qu’à tout âge (de 40 à 89 ans), il existe une relation linéaire forte entre le niveau de PA et le risque de mortalité d’origine CV. En outre, même dans les tranches d’âge les plus élevées (80-89 ans), une PA élevée s’accompagne d’un risque significativement augmenté de mortalité par AVC et/ou par coronaropathie. Même après 80 ans, une baisse de 20 mmHg de la PAS s’accompagne d’une réduction significative de 33 % du risque de mortalité CV.   Bénéfice du traitement antihypertenseur après 80 ans La majorité des essais ont inclus très peu de patients > 80 ans et, pris individuellement, ils n’ont pas la puissance statistique suffisante pour démontrer un bénéfice du traitement antihypertenseur dans cette tranche d’âge. Cependant, plusieurs études récentes soulignent le bénéfice du traitement antihypertenseur dans cette catégorie d’âge. Dans l’étude SCOPE (Study on COgnition and Prognosis in Elderly hypertensives), menée chez 4 964 patients hypertendus âgés de 70 à 89 ans, le traitement antihypertenseur a permis de réduire le risque d’AVC au moins jusqu’à l’âge de 89 ans. Une métaanalyse de sept essais thérapeutiques réalisés chez des hypertendus > 60 ans, ayant inclus des octogénaires, a permis de disposer d’informations pour 1 670 sujets hypertendus > 80 ans. Elle montre que la baisse tensionnelle obtenue par les médicaments chez les hypertendus > 80 ans permet de diminuer les complications CV non mortelles (AVC et insuffisance cardiaque) comparativement au placebo, sur un suivi moyen de 3,5 années (tableau). En revanche, aucun effet sur la mortalité totale n’est observé, celle-ci étant même légèrement augmentée mais de façon non significative + 6 % [IC95% : - 5 à + 18]. L’étude « HYVET pilote» (HYpertension in the Very Elderly Trial), réalisée chez 1 283 hypertendus > 80 ans, va dans le même sens et indique une réduction significative de 53 % des AVC dans le groupe traitement (versus pas de traitement) au terme d’un suivi de 13 mois. Aucune augmentation significative de la mortalité n’est observée dans le groupe traitement et la tolérance des antihypertenseurs apparaît bonne.   En pratique   Tous ces éléments soulignent que la baisse tensionnelle obtenue par le traitement antihypertenseur des sujets > 80 ans permet de diminuer la morbidité liée aux principales complications de l’hypertension que sont l’AVC et l’insuffisance cardiaque, sans toutefois diminuer la mortalité. À cet âge, c’est bien l’objectif que se fixe le praticien, afin de permettre à son patient un vieillissement réussi sans handicap et le maintien d’une bonne qualité de vie.

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