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Publié le 15 oct 2022Lecture 5 min

La chirurgie des varices - Hier, aujourd’hui et demain

Olivier CRETON, Hôpital Privé des Côtes d’Armor, Plérin

La chirurgie des varices, longtemps délaissée, connaît depuis 20 ans un regain d’intérêt porté par l’évolution des techniques qui amène à repenser complétement la prise en charge de cette pathologie.

Hier   Si en 1907, W. Babcock a révolutionné la chirurgie des varices en inventant le stripping, force est de constater que pendant un siècle, peu d’évolutions ont eu lieu et que la crossectomie-stripping est restée la technique de référence du traitement des troncs saphènes jusque dans les années 2000. Elle s’est néanmoins modernisée avec l’adaptation de la longueur du stripping à la longueur du reflux, sa réalisation par invagination et de la crossectomie sous les branches de la jonction saphéno-fémorale (JSF)(1).   L’évolution des techniques   Les premières techniques d’ablation endoveineuse thermique par laser et radiofréquence (TEV) sont apparues dans les années 2000, montrant rapidement d’excellent résultats à long terme avec une bonne tolérance(2). Il faudra cependant attendre 2014 (radiofréquence) et 2018 (laser) pour obtenir, en France, un remboursement de ces techniques par l’Assurance maladie et ouvrir la voie à une diffusion plus large. Depuis 2019, les traitements endovasculaires (TEV), dépassent en nombre les strippings classiques (figure 1)(3). Aujourd’hui, les TEV sont les techniques recommandées en première intention dans le traitement des troncs de la grande veine saphène (GVS), mais aussi de la petite veine saphène (PVS) et de la veine saphène antérieure accessoire de cuisse (VSAAC)(4). L’efficacité de ces TEV dans le traitement des troncs saphènes ne fait pas débat et l’innovation se fait donc vers la recherche d’un geste le moins invasif. C’est dans ce but que vont apparaître les techniques dites NTNT (non thermal non tumescent) qui regroupent les ablations mécanicochimiques (MOCA) et les occlusions par glue cyanocrylate (Vena-Seal™, Medtronic). • La technique MOCA consiste à irriter l’endothélium veineux à l’aide d’un dispositif en nitinol rotatif tandis qu’une sclérothérapie en phase liquide est injectée (figure 2). • La technique utilisant VenaSeal™ consiste à injecter une colle cyanoacrylate à prise rapide dans le tronc veineux à intervalles réguliers (figure 3). Ces techniques donneraient des résultats équivalents sur les occlusions à long terme avec une procédure moins invasive(5,6). Plusieurs études comparant leur efficacité et leur tolérance par rapport aux techniques thermiques sont en cours notamment l’étude SPECTRUM (VenaSeal™ vs RF) dont les résultats sont attendus. • La technique d’échosclérose mousse dans le traitement des troncs saphènes, moins invasive donne cependant des résultats à long terme décevants et ne doit plus être utilisée en première intention dans le traitement des troncs saphènes(4). • Les ultrasons focalisés à haute intensité. Dans la recherche d’un geste encore moins invasif, les ultrasons focalisés à haute intensité (HIFU) sont peut-être une technique d’avenir. Il s’agit, en focalisant des ultrasons sur une zone d’intérêt, de produire un échauffement suffisant pour obtenir une oblitération veineuse. Cette technique non invasive (sans effraction cutanée) est utilisée par quelques centres en Europe. Elle donne des résultats encourageants au prix d’une procédure longue et encore coûteuse (figure 4). La chirurgie de la récidive et le traitement des varices non tronculaires (perforantes, néojonctions, néovascularisations) restent encore mal codifiés. L’échosclérose mousse y garde une place prépondérante grâce à sa facilité d’utilisation, même si les résultats sont aléatoires(7). La vapeur d’eau donnait des résultats encourageants mais elle n’est plus distribuée. L’apparition de fibres laser de petit diamètre ouvre la possibilité au traitement de certaines lésions rectilignes(8). Enfin, des embolisations par colle ou coils ont été proposées. C’est un vaste domaine où des innovations sont nécessaires. Le traitement des varices tributaires fait encore très largement appel aux phlébectomies qui donnent d’excellent résultats à long terme(9). Dans le même temps que les techniques ont évolué, la connaissance de la pathologie veineuse superficielle s’est affinée. La pratique de l’écho-Doppler de cartographie préopératoire est un prérequis indispensable à la réalisation d’un geste de qualité et se doit d’être parfaitement maîtrisée par l’opérateur.   Les techniques évoluent, l’environnement aussi   Tout d’abord, cette chirurgie ne se conçoit que sur un mode ambulatoire avec une durée d’hospitalisation la plus courte possible et une reprise immédiate de la marche. Cela est permis par le recours systématique à une anesthésie locale tumescente qui est aujourd’hui largement recommandée(4,10). L’utilisation de lidocaïne adrénalinée diluée dans une solution bicarbonatée offre un très grand confort lors de l’injection(11), permet un geste complet (y compris des phlébectomies extensives) et donne d’excellents résultats en termes de récupération postopératoire(12,13). Au besoin, une légère sédation intraveineuse peut apporter un confort supplémentaire pour les patients anxieux ou devant certaines présentations cliniques particulières. La contention postopératoire doit être simple d’utilisation et de courte durée, elle n’aurait aucun effet bénéfique après 1 semaine voire 36 heures(14,15). Nous avons pris l’habitude d’utiliser deux bas de compression classe II superposés pendant 48 h (sauf la nuit) puis un seul pour une durée de 7 jours. Le risque principal des TEV est la complication thromboembolique notamment au niveau des jonctions. Ces lésions, appelées EHIT (endovenous heat induced thrombosis)(16), doivent être systématiquement dépistées aux alentours du 7e jour postopératoire par un contrôle écho-Doppler(4) mais ne nécessitent pas une thromboprophylaxie médicamenteuse systématique. Celle-ci doit être sélective en fonction des facteurs de risque du patient(4). Avec une prise en charge optimale, la durée d’hospitalisation peut quasiment être réduite au temps de l’acte chirurgical. Les patients qui n’ont pas eu de sédation peuvent regagner leur domicile au volant de leur véhicule, leur reprise d’activité est immédiate et un arrêt de travail n’est pas systématique. La pratique sportive est autorisée dans la mesure où elle s’effectue sans douleur. La durée moyenne d’arrêt de travail de notre cohorte de patients est de 2,4 jours. Avec une prise en charge optimale, il est aujourd’hui tout à fait possible de sortir la chirurgie des varices du bloc opératoire en utilisant, par exemple, des salles interventionnelles dédiées. Des expériences sont également menées en France dans des office based labs, comme cela est le cas partout en Europe, sans qu’aujourd’hui un modèle économique viable ne se dessine dans l’hexagone.   Conclusion   L’apport des techniques mini-invasives doit nous amener à repenser complétement le mode de prise en charge de la pathologie veineuse superficielle afin de tirer tout le bénéfice de ces innovations. Gardons à l’esprit qu’en réalisant une crossectomie-stripping classique, on utilise une technique développée il y a plus d’un siècle !

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